Si les recruteurs sillonnent fiévreusement la Côte d'Ivoire ou le Cameroun, ils ignorent la Namibie, ce qui a compliqué la tâche de Collin Benjamin, seul des 23 Namibiens retenus pour la Coupe d'Afrique des Nations (CAN-2008, 20 janvier-10 février au Ghana) à évoluer dans un grand championnat: à Hambourg, en Allemagne.
Il est arrivé à Hambourg en 2001 avec pour tout viatique le numéro de téléphone d'un ami d'ami, chef d'entreprise allemand ayant de vagues relations dans le football.
L'expérience en Allemagne, l'ancienne puissance coloniale qui a contrôlé la Namibie de 1884 à 1919, a bien failli tourner court après des essais infructueux dans des clubs de 3e division et amateur, à cause du froid et de l'hostilité manifestée par certains joueurs ou entraîneurs.
"Je pesais 70 kilos, j'étais un gamin fluet, tout le monde était plus rapide, plus costaud que moi. Je me suis vite résigné en me disant que j'avais laissé passer ma chance", a expliqué récemment Benjamin, dans le magazine 11Freunde.
Mais, alors qu'il s'apprêtait à repartir pour Windhoek, l'enfant de Katutura, un township de la capitale namibienne, est repéré par un entraîneur du Rasensport Elmshorn, un club de 5e division de la banlieue d'Hambourg.
Un premier coup de pouce du destin qui lui permet de s'étoffer physiquement et de gagner de l'expérience pendant une saison. La seconde rencontre capitale a lieu lors d'un match contre l'équipe réserve d'Hambourg.
Polyvalence
"On a fait match nul 2-2, j'ai marqué un but et fait la passe décisive pour notre deuxième but et leur entraîneur a dit après le match: 'Le black là-bas, il nous le faut'", raconte le milieu de terrain de 29 ans.
En 2001, Benjamin signe son premier contrat pro après avoir convaincu par sa polyvalence (il joue défenseur à Hambourg, mais avant-centre avec les "Brave Warriors", le surnom de la sélection namibienne), son endurance et ses dribbles.
S'il n'a jamais été titulaire indiscutable au HSV, Benjamin a disputé 107 matches de Bundesliga, marqué 30 buts, résisté aux changements d'entraîneur et même à sa rétrogradation chez les amateurs durant six mois en 2006 pour permettre l'arrivée du Brésilien Ailton.
"Je suis heureux de ce que j'ai. Je trouve extraordinaire d'être venu en Allemagne. Je n'ai pas suivi le chemin pris par la plupart des joueurs, j'ai pris mon destin en main et je suis heureux d'être parvenu où j'en suis", insiste Benjamin, qui a disputé six matches (un but) de championnat cette saison.
Avant de disputer la deuxième CAN de l'histoire de son pays (élimination dès le 1er tour en 1998), Benjamin ne se fait guère d'illusions, d'autant que la Namibie, 114e nation au classement Fifa, affronte le Ghana, pays hôte, le Maroc et la Guinée dans le groupe A.
"Nous sommes un petit pays dans le monde du football, nous ne sommes rien, mais comme ma carrière le montre, il y a toujours des surprises en football", espère-t-il.